ISRAËL ET LES PALESTINIENS
7 OCTOBRE 2023
L’attaque d’Israël par le Hamas le 7 octobre 2023, une horreur absolue, a fait beaucoup de tort à la cause palestinienne, et risque fort d’être l’étincelle qui déclenche un embrasement du Moyen-Orient.La vengeance israélienne, qui va se traduire par un nombre épouvantable de morts et de blessés dans les deux camps, va beaucoup desservir la cause d’Israël.
Ces morts, blessés et destructions s’ajoutent à ceux des multiples décennies de conflits pour un problème dont la résolution s'éloigne à chaque fois, d'autant plus que le pouvoir des deux camps est entre les mains d’extrémistes qui veulent éliminer l’autre.
Il devient vital que les Occidentaux, qui financent ces guerres puis les reconstructions, s’imposent.
Dans mon premier essai, paru en 2007, j’avais évoqué le problème palestinien et, surtout, une méthode pour espérer le régler.
TEXTE PUBLIÉ EN 2007
116 ans !116 ans : c’est le record du monde le plus stupide qui soit, la durée d’une guerre, record que nous partageons depuis bientôt cinq siècles et demi avec nos amis anglais !
Et encore plus stupide : nous risquons d’en être dépossédés par les Israéliens et les Palestiniens si nous, Occidentaux et Israéliens, continuons à penser que les conflits de ce type se règlent par les armes et que
la raison du plus fort est toujours la meilleure.
Nos échecs systématiques depuis 1954 ne nous ont rien appris : L’Indochine ? L’Algérie ? Le Viet-nam ? La Somalie ? L’Afghanistan (de l’ex-URSS et, hélas, aussi le nôtre) ? … L’Irak ?
Alors, va-t-on continuer longtemps à croire que la puissance de nos armées permet de vaincre les peuples qui luttent pour leur indépendance ou pour la libération de leur territoire ?
Le conflit israélo-palestinien dure depuis une soixantaine d'années. À quoi sert-il ? À qui profite-t-il ? A-t-il des retombées positives autres que celles qui concernent les marchands d’armes et leurs actionnaires, les banques suisses et… certains hommes au pouvoir ?
Israël dispose d’une puissance militaire mille fois, cent mille fois supérieure à celle des Palestiniens. Et pourtant, nous en sommes toujours au même stade, sauf qu’avec le temps, la croissance des populations palestinienne et israélienne ne facilite pas la solution du problème.
Quant aux centaines de milliers de victimes de part et d’autre, il faut espérer pour elles que l’au-delà leur est plus favorable que ne l’a été leur triste et absurde ici-bas !
Quand va-t-on prendre conscience que les conflits du Moyen-Orient, menés par Israël et par les Occidentaux, sont le meilleur ferment de la haine des ayatollahs musulmans à notre égard et le meilleur terreau du terrorisme ?
Toute guerre est effrayante et absurde. Hélas, c’est dans la nature de l’Homme – et plus encore dans celle de ses leaders, y compris religieux, qui, évidemment, se gardent bien d’être en première ligne pour en subir les conséquences. Pourrait-on rêver que les plus puissants de ce monde, hommes d’États et d’Églises, se mettent autour d’une table avec la ferme volonté de trouver des solutions pour éviter les conflits armés et lutter efficacement contre les ferments des guerres et du terrorisme ?
Mais, au préalable, il faudrait définir ce qu’est un acte terroriste, car, aujourd’hui, est terroriste notre ennemi dès lors qu’il ne dispose pas de moyens militaires à la hauteur des nôtres.
Et s’il s’agit d’un État, c’est un
État voyou.
Il n’est guère contestable de dire que les actes pratiqués aux États-Unis en septembre 2001, à Madrid, à Londres, à Bali, etc. étaient des actes terroristes. Mais les Palestiniens défendant leur territoire ne sont pas des terroristes. Quelle est la différence entre nos résistants des années quarante et les
terroristes palestiniens? … A-t-on remarqué qu’il a suffi que l’occupation de notre pays cesse pour que les actes terroristes cessent ? Même chose avec l’Algérie en 1962.
Donnez des F16, des chars, des missiles aux Palestiniens, ils deviendront de valeureux soldats de l’armée palestinienne (comme leurs homologues israéliens) et ils pourront alors tuer dix fois plus de civils innocents qu’ils ne le font aujourd’hui. En d’autres termes, celui qui défend son pays avec les moyens dont il dispose en s’attaquant à l’occupant n’est pas – et ne doit pas être considéré comme - un terroriste avec lequel on refuse de négocier. C’est un
combattant pauvrepar opposition au
combattant richequi dispose de toute la panoplie des armes les plus modernes.
Notons en passant que, tout
terroristesqu’ils soient, les Palestiniens font dix fois moins de morts du côté israélien que n’en font les Israéliens du côté palestinien !
Les Israéliens et leurs alliés inconditionnels se sont-ils posé les deux questions suivantes :
1. Comment se comporteraient les Israéliens si les situations étaient inversées ?
2. Comment se sont comportés les premiers sionistes au début de leur implantation en Palestine ?
Avant de juger et de condamner son adversaire, il serait bon de se demander comment on agirait si on était à sa place. Hélas, ça n’est jamais le cas, chacun voyant midi à sa porte.
D’autre part, comment peut-on faire la paix si ce n’est en négociant avec son ennemi ? Sinon, il faut l’éliminer définitivement, c’est-à-dire éliminer toute la population concernée : les Palestiniens et leurs amis arabes et/ou musulmans, ce qui fait… des centaines de millions d’êtres humains à envoyer dans l’autre monde.
Peut-on penser que le général de Gaulle avait une quelconque sympathie en 1962 pour les rebelles algériens ? Mais, pour en finir avec cette guerre, il n’avait pas le choix. Il a négocié avec eux, alors qu’ils n’avaient même pas respecté les conditions préalables à toute négociation mises par la France, et ce fut la fin de la guerre d’Algérie… et la fin des attentats (avec, comment souvent, un certain décalage).
Pour avoir voyagé au Moyen-Orient en 1965 et en Israël en 1968 et m’être intéressé aux conflits dans cette région en tant que simple observateur, pour les avoir suivis depuis cette époque en m’intéressant plus à ce qu’il y avait derrière les mots et entre les lignes de ceux qui parlent ou écrivent sur les événements, pour avoir lu notamment le livre de Charles Enderlin
Le rêve brisé, j’en tire les conclusions suivantes :
- Le problème palestinien aurait pu être réglé dans les années 50-60, d’une part si les pays arabes n’avaient pas tenu à en faire un alibi politique, de lutte contre Israël en premier lieu et d’autre part, si les pays occidentaux avaient eu une réelle volonté de le résoudre.
- En 2000, sur la base des descriptions très documentées de Charles Enderlin, les négociations menées par l’équipe américaine sous la conduite de Bill Clinton m’ont paru, disons, inadéquates. Il était évident que ni Ehoud Barak ni Yasser Arafat ne pouvaient signer de plein gré un quelconque accord qui impliquait des concessions inacceptables aux yeux de leurs opposants et/ou extrémistes, outre les hésitations inhérentes au caractère de l’un et de l’autre. Et signer un tel accord serait revenu pour eux à signer leur propre arrêt de mort, politique et physique.
- L’équipe de médiation américaine aurait dû être composée de personnalités neutres par rapport à Israël et à la Palestine, ou à parité. Ce n’était pas le cas, presque tous les Conseillers américains étaient juifs. Ainsi, Arafat a dû avoir la désagréable impression d’être tombé dans un guet-apens.
La réponse est oui, à condition de changer de méthode. Celle qui consiste à ne reconnaître que la force et à n’inviter que les seuls protagonistes jugés fréquentables
autour d’une tasse de thépour négocier un accord de paix a échoué à de multiples reprises. Et, comme il y a soixante-dix ans que ça dure et objectivement aucune raison pour que ça change, il est peut-être temps d’envisager une autre façon d’aborder le problème.
Les deux peuples veulent la paix, leurs Dirigeants ne sont pas capables de la leur donner, voire n’en ont pas envie. C’est donc à nous d’agir et d’être des partenaires actifs à une table de négociation, en sachant que plusieurs projets d’accord ont déjà été préparés par des négociateurs israéliens et palestiniens qui ont fait preuve en 2000 et à Genève d’une sagesse, d’un sens des responsabilités et d’un respect mutuel assez remarquables, semble-t-il.
Il s’avère que ce conflit, outre les drames humains de part et d’autre, coûte très cher aux pays occidentaux, financièrement et politiquement. De plus, c’est un vrai tonneau des Danaïdes, car on leur donne l’argent nécessaire pour détruire ce qui a été construit avec notre argent ! ...Il doit exister dans le monde des causes plus utiles à financer.
Par ailleurs, les États-Unis soutiennent et financent plus Israël que la Palestine et les Européens plus la Palestine qu’Israël.
-
Je préconise la méthode suivante :
- Un Collège d’arbitres (le Secrétaire général des Nations Unies, la Russie, la Chine… ?), réunit d’un côté Israël et les États-Unis,
de l’autre les Palestiniens et l’Union européenne avec la ferme intention de la part des États-Unis et de l’Union européenne de
siffler la fin de la partie
, et de le faire savoir aux deux intéressés : si vous continuez à faire la guerre, nous vous coupons les vivres. Si vous faites la paix, nous vous financerons votre reconstruction et votre développement. C’est simple, mais cela implique que les États-Unis, l’Union européenne et le collège d’arbitres aient un grand souci d’équité, d’humanité et de réalisme ; - Le Collège d’arbitres doit être neutre, religieusement et politiquement, la notion religieuse n’étant pas liée à une pratique, mais à une appartenance culturelle ou à une sensibilité. La délégation américaine doit être à dominante juive, mais avec quelques musulmans, la délégation européenne à dominante musulmane/chrétienne pro palestinienne, mais avec quelques juifs. L’une et l’autre doivent jouer un rôle de modérateur de leur camp et l’une et l’autre doivent s’entendre sur un accord raisonnable pour les deux parties et agir à fronts renversés : aux Américains d’imposer, de gérer puis d’endosser la responsabilité des concessions Israéliennes, aux Européens d’imposer, de gérer puis d’endosser la responsabilité de celles faites par les Palestiniens ;
- Aucune concession préalable ne doit être demandée, ni la reconnaissance d’Israël par le Hamas ou par tout autre participant aux négociations, ni le refus de négocier avec le Hamas, ou avec tout autre mouvement dit terroriste dès lors qu’il est un représentant légal ou de fait de son peuple ;
- Les grandes lignes d’un projet d’accord auront été négociées au préalable par les négociateurs israéliens et palestiniens comme ils l’avaient fait en 2000.
- L’accord conclu, les États-Unis et l’Union européenne devront aider les deux gouvernements à faire accepter le compromis par leur peuple, en attribuant aux négociateurs du pays le mérite des concessions arrachées au camp adverse, et aux Occidentaux et aux Arbitres la responsabilité des concessions faites.
- Le Collège d’arbitres, l’ONU, les États-Unis et l’Europe devront s’engager à faire respecter scrupuleusement par les deux parties l’intégralité des éléments de l’accord. Ils devront s’appliquer aussi à faire reconstruire les deux pays ensemble, avec des Palestiniens en Israël et des Israéliens en Palestine, parce que la symbolique a de l’importance dans cette région du monde et qu’il faut aussi leur réapprendre à travailler ensemble et en confiance.
Le plus triste dans cette affaire, c’est que les deux peuples sont complémentaires et s’entendent plutôt bien quand leurs relations ne sont pas pourries par le conflit, ses conséquences et les surenchères de la loi du talion.
S’il est permis de rêver, plutôt que de chercher à imposer la démocratie au Moyen-Orient par la guerre avec le succès que l’on constate tous les jours, ne pourrait-on pas essayer de lancer l’idée d’une Union du Moyen-Orient et du Maghreb dès la résolution du conflit Palestinien, le tout étant accompagné d’un plan Marshall (qui a sans doute beaucoup contribué à la réconciliation de l’Europe et à sa volonté de tourner définitivement la page des guerres) ?
Est-ce une plus grande utopie que celle qui a été lancée par les Pères fondateurs de l’Europe ? Sans doute, mais avec une différence notable : nous savons aujourd’hui qu’une telle utopie peut se réaliser et ça, c’est un point très important. Alors, au lieu d’envisager d’intégrer la Turquie dans l’Union européenne, ce que beaucoup d’États ne souhaitent pas sans oser le dire, parrainons cette deuxième Union entre la Turquie, Israël et la Palestine en paix, et d’autres pays dont l’Égypte, la Jordanie, le Maghreb…
Depuis la chute du mur de Berlin, le monde n’est plus en guerre idéologique puisque tous les pays un peu importants adhèrent, dans les faits, au capitalisme. En revanche, il est en guerre économique et l’approvisionnement en matières premières, et notamment en pétrole, est une préoccupation majeure des principales puissances. Dans ces conditions, qui aurait intérêt à ce qu’il y ait des conflits au Moyen-Orient ?
Alors, qui s’opposerait à ce que cette région du monde soit en paix et prospère ?
SITUATION FIN NOVEMBRE 2023
À mon sens, cette méthode de 2007 est plus valable que jamais, sauf l’implication de la Russie qui s’est mis hors-jeu avec son attaque de l’Ukraine.Je verrais bien l’Inde pour la remplacer… pour faire prendre conscience à son Président, Narendra Modi, des conséquences du fanatisme et du sectarisme religieux !
… Ou, de charger la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni qui ont subi trois grands conflits avant de se réconcilier. Je crois à l’exemple, et tendre la main à son ennemi historique pour conclure une vraie paix n’est pas un signe de faiblesse, mais d’intelligence que les peuples attendent !
Les Dirigeants occidentaux se satisfaisaient de ce conflit larvé qu’ils n’ont pas eu la sagesse, le courage de régler définitivement. Le comble, c’est que nombreux sont ceux qui envisagent de recommencer – un conflit non résolu – dans le cas de la Russie et de l’Ukraine !
La fracture est très profonde, la facture sera énorme et les victimes innombrables si ceux qui financent les belligérants n’imposent pas d’arrêter tout de suite les combats, puis d’étudier une solution à deux États, préconisée aussi, notamment par l’ancien ambassadeur d’Israël en France, M. Élie Barnavi !
Pour moi, il devrait s’agir de deux États, plus Jérusalem, Ville-sainte, État indépendant.
Il faut rappeler que les deux ennemis, le Hamas et la droite extrême et religieuse israélienne s’opposaient aux accords d’Oslo et portent ensemble la responsabilité de la situation actuelle… chacun voulant chasser l’autre de la Palestine, et il n’y a aucun espoir qu’ils y renoncent sans une action très ferme de tous leurs soutiens financiers.
Sont aussi lourdement responsables les Occidentaux et les pays du Proche et du Moyen Orient.
L’enjeu pour les Démocraties occidentales est très important, et ma grande crainte, c’est que nos
Puissantsimpuissants calment le jeu à coups de milliards jusqu’à la prochaine fois.
SOLUTION PRÉCONISÉE
- Création d’un « Comité pour une paix durable en Palestine » constitué par les pays qui financent les Israéliens et/ou les Palestiniens, plus quelques « Parrains » potentiels ;
- Sélection d’une douzaine d’Israéliens et d’autant de Palestiniens (de Cisjordanie et de Gaza), ayant entre 40 et 60 ans, hommes et
femmes, dirigeants modérés ou futurs dirigeants, ayant la ferme volonté de construire une solution à deux/trois États pour participer à
l’élaboration du projet.
En revanche, tous les fauteurs de troubles et de guerre : le gouvernement israélien et tous les mouvements palestiniens (Hamas, O.L.P., etc.) seront exclus des discussions. - Partage de la Palestine par le
Comité
et lesvingt-quatre
, pour former deux États viables, équitables et indépendants.
Jérusalem, Ville sainte, deviendrait leVatican des Religions du Livre
. Elle serait indépendante, ouverte, neutre et gouvernée par un triumvirat de laïcs modérés, juif, chrétien, musulman ; - Création de l’État Palestinien, de l’État de Jérusalem, et du nouvel État d’Israël, avec leurs structures juridiques et la constitution de leurs gouvernements, provisoires pour deux ans ;
- Ébauche d’une future
Union de la Méditerranée
, Union qui devrait avoir une participation croisée avec l’Union européenne. - Un refus du plan de paix ainsi défini entraînerait l’arrêt immédiat de tous les financements.
À l’inverse, son acceptation serait accompagnée de toutes les aides nécessaires des Américains, des Européens et desParrains
pour leurs reconstructions et leurs développements.